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No2
   15-septembre-1999   

LA NEGOCIATION SUR L'AMENAGEMENT ET LA REDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL CHEZ COCA-COLA ENTREPRISE

Où en est la négociation sur l'aménagement et la réduction du temps de travail?

Plusieurs réunions ont déjà eu lieu où les différentes parties ont précisé leurs motivations et où les principes des deux lois Aubry ont été examinés au regard de l'activité particulière de notre entreprise. Sept réunions sont encore programmées jusqu'en novembre.

A quoi va aboutir la négociation sur l'ARTT chez Coca-Cola Entreprise?

La réduction du temps de travail est une obligation incontournable puisque c'est une nouvelle loi du travail, et l'application sera en oeuvre à partir du 1er janvier de l'an 2000.
A cette obligation de réduction du temps de travail s'ajoute une incitation à la négociation entre l'employeur et les syndicats pour l'aménagement en tenant compte des besoins de l'entreprise et des salariés.
Ces besoins ont été identifiés d'un commun accord dès 1998: "Il sera examiné au regard de la loi nouvelle les différentes possibilités en poursuivant l'objectif d'éviter d'augmenter les contraintes des salariés, de prendre en compte leurs aspirations sans pour autant dégrader les résultats économiques de l'Entreprise." (Accord salarial 1998)
En clair, il s'agit pour les deux partenaires, employeur et syndicats, de tenir compte du client qui conditionne par ses achats la pérennité de notre travail, des actionnaires qui soutiennent financièrement le développement et les risques de l'entreprise et des salariés qui au delà de la vie d'entreprise ont une vie privée qu'ils souhaitent avec raison préserver et améliorer.

Des points sont-ils déjà acquis dans les réunions de négociation qui ont eu lieu?

Chaque partie est consciente que l'activité des soft drinks obéit à des demandes des clients qui, au delà des habitudes alimentaires, dépendent des saisons, du temps qu'il fait et de la différence entre les températures minimale et maximale de la journée.
Des garanties ont été données par l'employeur sous réserve de la conclusion d'un accord, le "maintien du salaire de base. Cet engagement signifie que le passage de 38h00 à 35h00 n'entraîne pas de réduction mécanique des éléments qui composent le salaire de base. Ces éléments correspondent à des parties fixes permanentes et récurrentes du salaire qui sont:
- la 1ère ligne du bulletin de paye,
- la prime d'ancienneté,
- le 13ème mois."
Ces garanties montrent que les inquiétudes qui s'étaient manifestées parmi les salariés étaient vaines.
Lors de la dernière réunion, des syndicats ont précisé qu'ils souhaitaient que l'employeur s'engage sur le respect des accords existants au sein de Coca-Cola Entreprise et que plus tôt des garanties seront données par l'employeur, meilleur sera le climat de la négociation et le dialogue.

Coca-Cola Entreprise veut-il signer un accord sur l'aménagement et la réduction du temps de travail ?

Les salariés pouvaient légitimement se poser la question au début de 1999, puisque le début des discussions préliminaires, qui avaient été demandées par les syndicats en 98, était retardé de mois en mois. La conclusion d'un accord sur les groupes de travail s'est faite aussi avec des réunions tellement espacées qu'on pouvait encore se poser la question. Les motivations de l'employeur étaient aussi peu compréhensibles et changeantes: au départ l'employeur annonçait ne pas être intéressé par les aides gouvernementales, puis qu'il ne les excluait plus et enfin, n'en parlait plus. Aujourd'hui, Coca-Cola Entreprise a défini avec les syndicats un calendrier de travail enfin concret, s'est engagé à présenter et discuter des textes de quasi-accord et a manifesté son intention de vouloir signer un accord au plus tôt pour novembre 1999.


L'ENQUETE PUBLIQUE DE FORCE OUVRIERE SUR LES 35h CHEZ COCA-COLA ENTREPRISE

Quels avantages les salariés voient pour eux et l'entreprise à un aménagement et une réduction du temps de travail?

Les réponses à notre enquête publique se recoupent très souvent.
Pour eux-mêmes les salariés voient "une meilleure gestion de leur vie privée, de leurs loisirs", "plus de temps libre pour eux et leur famille", "plus de vie familiale", "plus de repos, de détente, de loisirs".
Pour l'entreprise, les salariés voient qu'"un aménagement doit favoriser une amélioration des conditions de travail", "beaucoup moins d'accidents de travail", "une meilleure adaptation sur le poste de travail", "moins de fatigue apporte une meilleure efficacité, un meilleur rendement", "une baisse sensible du nombre d'heure diminuerait la fatigue et améliorerait le rythme biologique du sommeil, avec augmentation de la force de travail en qualité, quantité et motivation", "une meilleure performance de l'entreprise en terme de production".

Quels aménagement et réduction du temps de travail les salariés jugent profitables pour eux?

La crainte évidente est que l'employeur demande aux salariés de "fournir en 35 heures la valeur de travail qu'il demandait en 38 heures auparavant", Il y a constat que "la création d'emplois est l'intérêt de tous".

Au niveau du type de diminution "une réduction d'heures étalées dans le temps (une heure par-ci, une heure par-là) ne serait pas bénéfique", "une journée de travail commencée, qu'elle soit de 7, 8h ou 9h est une journée consommée".
Pour les salariés qui travaillent en 3/8, la piste de solution la plus demandée est "avoir un week-end de 3 jours". Par contre, les salariés en 3/8 disent pour les jours de repos épargnés "je suis contre", "ces jours sont à prendre sous certaines conditions peu avantageuses avec risque de jours bloqués dans des périodes qui n'intéressent pas les salariés".
Pour les salariés en horaire journée, "il est évident que l'on peut envisager un système plus souple". La priorité paraît "une réduction conséquente du temps de présence de 9h à l'heure actuelle, qui n'engendre qu'une fatigue en fin de journée et une baisse d'efficacité", "pour le travail en journée, il serait tout à fait souhaitable, pour les salariés qui le désirent, d'envisager une pause repas de 30 minutes", "cette pause réduirait le temps de présence dont l'inconvénient majeur est la fatigue de la longue journée qui n'allonge pas le temps de travail".
Dans le cadre des groupes de travail, la demande de possibilité d'horaire individualisé a été faite dans les fonctions support avec une plage fixe obligatoire dans la journée et des plages mobiles pouvant être choisies par le salarié en arrivée ou en départ. Cette réclamation a été entendue par Coca-Cola Entreprise qui l'a introduite comme élément dans les documents remis lors de la dernière réunion de négociation de l'ARTT.


LES NOUVEAUX DROITS ET DEVOIRS DES SALARIES

La définition du temps de travail effectif est introduite dans le Code du travail par la loi Aubry. Quelles conséquences en résulte-t-il pour les salariés ?

Le Code du travail ne définissait, avant la loi Aubry, la durée du travail que par l'exclusion "du temps nécessaire à l'habillage et au casse-croûte".

La loi no 98-461 du 13 juin 1998 (1ère loi Aubry) insère dans l'article L.212-4 du Code du travail un nouvel alinéa: "La durée de travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles".
Cette définition est une avancée intéressante puisqu'elle est moins restrictive que la Directive européenne du 23 novembre 1993 sur l'aménagement du temps de travail. Etre "à la disposition de l'employeur et se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles" (Loi Aubry) est bien différent de être "à la disposition de l'employeur, dans l'exercice de son activité ou de ses fonctions" (Directive européenne).
Pour notre entreprise où les commerciaux constituent une majorité des salariés, il n'est plus possible de considérer que l'on commence à travailler dès lors qu'on arrive chez le premier client.
En pratique, la notion de temps de travail effectif sert à déterminer la durée du travail quotidien, ce qui permet:
1o de calculer les droits à congés payés,
2o de calculer la durée maximale du travail quotidien et hebdomadaire,
3o de calculer les heures supplémentaires
4o de calculer le repos quotidien entre deux jours de travail
5o de calculer, selon la 1ère loi Aubry, la réduction de travail effectif de 10% pour les entreprises qui souhaitent, dans le cadre d'un accord, obtenir des aides gouvernementales sous réserve de 6% d'embauches par rapport à l'effectif concerné par la réduction du temps de travail.

La définition du temps de pause est introduite dans l'accord national de la branche des eaux embouteillées et boissons rafraîchissantes sans alcool et de bière. Quels avantages en résulte-t-il pour les salariés ?

L'horaire de travail est composé du temps de travail et du temps de repos selon le Code du travail, articles L 620-2 et R 620-2. Cet horaire de pause (si la pause est déterminée par l'employeur) doit être affiché.
L'accord de branche rappelle ces dispositions légales et les précise. Il indique que le temps de pause "est identifié dans l'horaire collectif de travail". Il encadre aussi sa pratique, dans le cas où cet horaire de pause n'est pas affiché: "Lorsque le moment de la pause n'est pas déterminé, le salarié fixe le moment de celle-ci au regard de ses souhaits et des impératifs de bon fonctionnement de l'entreprise". En précisant que "les salariés utilisent à leur convenance le temps de pause pendant lequel ils n'exercent plus leur travail", l'accord de branche définit clairement les droits des salariés (et les devoirs de l'employeur).
La loi Aubry a introduit aussi dans le Code du travail un alinéa à l'article L 220-2: "Aucun temps de travail ne peut atteindre six heures sans que le salarié bénéficie d'un temps de pause d'une durée minimale de vingt minutes, sauf disposition conventionnelle plus favorable fixant un temps de pause supérieur".
Cet alinéa est d'application immédiate, à la différence de celui sur la durée légale de travail de 35 heures qui n'est obligatoire qu'à partir du 1er janvier de l'an 2000.
Cet aménagement de l'horaire du travail concernant tous les salariés est nouveau dans le code du travail.
Une disposition sur des pauses obligatoires ne figurait auparavant que dans des conventions collectives et pour le travail posté. Notre Convention Collective Nationale des activités de production des eaux embouteillées et boissons rafraîchissantes sans alcool et de bière précise que dans une "équipe ayant un horaire quotidien ininterrompu de huit heures au moins, ce personnel a droit à un temps payé qui ne pourra pas être inférieur à trente minutes pour casse-croûte". Entre 6h et 8, ce temps payé est de 20 minutes. Ce temps de casse-croûte obligatoire et payé est une disposition qui devra s'appliquer aussi à partir du 1er janvier de l'an 2000. La réduction du temps de travail effectif de 36h30 à 35h en équipe va donc créer un plus pour les salariés. Quand l'horaire légal était de 39 heures, l'employeur pouvait dire que le supplément en pause était déjà payé pour les équipes puisque les salariés ne faisaient que 36h30. Quand l'horaire légal sera à 35 heures, l'employeur sera obligé de payer ce temps en plus de l'horaire légal.
Pour les salariés en journée, la législation ne précise rien à part l'obligation de pause de 20 minutes. Dans les groupes de travail, l'imposition de présence de 43 heures par semaine pour 38 heures seulement de travail effectif a été caractérisée comme n'amenant qu'une fatigue inutile à la longue, n'apportant (sauf pour ceux qui sortaient pour déjeuner chez eux) souvent qu'une cassure du salarié dans l'élan de son travail. Pour l'entreprise, le travail des salariés en journée ne peut être continué que par eux-mêmes et l'urgence de certaines tâches certains jours n'est pas compatible avec les heures supplémentaires qui s'ajoutent physiologiquement au temps de présence et non au temps de travail effectif. Si deux heures supplémentaires sont faites puisque la durée maximale journalière de travail est de 10 heures, le salarié fait physiologiquement 11 heures de présence (presque la journée de travail en équipe de suppléance). Dans la mesure où la loi Aubry vise à éviter d'avoir à payer des heures supplémentaires (en reportant en jours de repos ARTT l'accumulation des heures déjà faites en plus au fil des semaines), cette souplesse devrait être saisie par l'employeur comme une opportunité pour revoir la contrainte de la pause d'une heure (sauf pour les salariés qui souhaiteraient la conserver) qui ne profite à personne.

   top.gif    Dépôt CCE Clamart: 15-septembre-1999   
   c.gif    Responsable de publication: Gaby ZENOU